Quand l’automatisation met fin à 42 ans de bureaucratie kafkaïenne
Avec le lancement d’AIGLES le 1er janvier 2025, près de 200.000 fonctionnaires camerounais voient leurs droits administratifs automatiquement reconnus. Une première dans l’histoire du pays qui marque la fin des interminables files d’attente et des dossiers perdus dans les méandres de l’administration.
L’histoire retiendra peut-être que c’est par une simple note d’information, portant le numéro 1/000001, que l’administration camerounaise est entrée dans le XXIe siècle. En ce début janvier 2025, le ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative annonce une nouvelle qui sonne comme une petite révolution : les avancements d’échelon et de classe des fonctionnaires deviennent automatiques. Pour les quelque 200.000 agents de l’État concernés, c’est la fin d’un cauchemar bureaucratique vieux de quatre décennies.L’impact est immédiat et les chiffres parlent d’eux-mêmes. En à peine quelques jours, 176.894 personnels voient leur situation administrative régularisée. Plus remarquable encore, 21.810 agents, exempts de toute procédure disciplinaire, bénéficient instantanément d’une mise à jour de leur statut pour le mois de janvier. Derrière ces chiffres se cache une réalité plus profonde : la transformation digitale de l’État camerounais n’est plus un vœu pieux mais une réalité tangible.AIGLES (Application Informatique de Gestion Logique des Effectifs et de la Solde) n’est pas qu’un simple outil informatique. En remplaçant les systèmes obsolètes SIGIPES et ANTILOPE, cette plateforme marque l’avènement d’une nouvelle ère administrative. Finis les dossiers égarés, les procédures interminables et les droits bafoués par la paperasserie. Désormais, chaque fonctionnaire est automatiquement repositionné à son niveau de carrière exact, avec les effets financiers correspondants.La modernisation ne s’arrête pas là. Le ministère, conscient des défis de cette transition numérique, déploie un dispositif d’accompagnement résolument moderne : portail web, numéro vert et même un canal WhatsApp. Une approche qui témoigne d’une volonté de rupture avec les pratiques du passé.Cette réforme s’inscrit dans le cadre plus large de la Stratégie Nationale de Développement du Cameroun à l’horizon 2030. Elle traduit une vision où l’efficacité administrative n’est plus sacrifiée sur l’autel de la bureaucratie. Les rappels financiers dûs aux agents seront progressivement apurés au cours de l’année en cours, un signe qui démontre que la modernisation ne se fait pas au détriment des droits acquis.Alors que le Cameroun se prépare à des échéances électorales majeures en cette année 2025, cette réforme administrative pourrait bien être le leg le plus durable du gouvernement actuel. Car au-delà des aspects techniques, c’est bien d’une révolution culturelle qu’il s’agit : celle d’une administration enfin réconciliée avec ses agents et ses usagers. Une révolution silencieuse, certes, mais dont les effets se feront sentir bien au-delà des couloirs ministériels.
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